TAM DAOMes premiers souvenirs remontent aux années 1933-34. C'est l'époque où la station était surtout construite sur son flanc sud, depuis l'église jusqu'au fond du cirque, et très peu au delà de la cascade. Véritable maquis, c'était le terrain d'exploration où "les grands" installaient des cabanes secrètes : ma soeur Geneviève était infirmière avec Colette Dartiguenave, il y avait là son frère Jean (surnommé Bébé Rose, qui mourut quelques années plus tard), Nicole et Jean Fabre (qui affolait "les petits" avec son poignard), et bien d'autres amis de leur âge que j'oublie. Dans ces années de mon enfance, les grands terrains du centre n'étaient que des pelouses banales, où les grands jouaient néanmoins déjà au foot. C'est ainsi que, jeune spectateur sur leur bord, je reçus en pleine poitrine un ballon shooté par l'aîné des Butreau, qui me coupa le souffle et me dégoûta des ballons pour le reste de mes jours. .. C'est dans ces temps là aussi que, le 14 Juillet, il y avait des courses de bateaux et des joutes sur la petite piscine ( la grande n'était pas encore construite) : j'en garde une carte postale sur laquelle figurent ma sœur Geneviève, dite « Toupiette », mon frère Jean (de dos) et l'un des Le Meillour (lequel ?). Mes souvenirs sautent ensuite aux meilleures années de notre jeunesse, malgré la guerre (mais qu'était-elle à notre âge ?) entre 1938 et 1942, parce qu'ensuite, hélas, ma famille n'y est pas retournée. La grande distraction du samedi après-midi était l'attente, sur le parapet de l'hôtel de la Cascade d'Argent, de l'arrivée des voitures ou de l'autocar qui amenaient d'Hanoï les pères de famille : on supputait la marque des voitures aperçues de loin, on pariait sur l'heure d'arrivée du car. Et puis ensuite, c'était le dancing à l'hôtel, souvent sur sa piste extérieure. Là se retrouvaient nos grands frères et sœurs, qui commençaient à danser, la valse et le tango, mais aussi le fox-trot puis le lambeth-walk et ensuite le horsey-horsey ! Mais nous les accompagnions, et supputions les idylles qui se nouaient. J'étais alors en âge de sortir seul, ou avec des amis (J-C. Lafon, H. Fayet, C. Camboulive, B. Marliangeas, et tant d'autres dont le nom m'échappe) : nous jouions aux gendarmes-voleurs, faisions de grandes balades : le Pic Nord, le Pic Sud, le Lac vert (avec ses serpents d'eau !), le Petit Tour de ceinture qui passait derrière les maisons, et parfois, mais avec de grandes personnes, le Grand Tour de ceinture qui, lui, passait du Pic Nord au Pic Sud par derrière les crêtes, sur l'autre versant de la montagne. Je ne suis jamais allé aux deux autres sommets, le « 1385 » et le « 1400 » car il fallait être plus grand pour partir deux jours. Il y avait toujours la fête du 14 Juillet avec d'abord la retraite aux flambeaux, précédée de Monsieur CANERI, le commandant de la Garde Indigène locale, sur son cheval ( rouan ou pie ?). Ce brave homme était souvent l'objet de dérisions, de chansonnettes… Les soirs de grand chahut, on prenait un malin plaisir à jouer au chat et à la souris avec la Garde. Il est arrivé aussi qu'il se fasse narguer du haut du plongeoir de la grande piscine… Le 14 juillet donc, se tenaient des courses et des jeux dans la grande piscine – avec concours et prix – et aussi sur les tennis, et je me souviens même d'une course de côte automobile depuis le Pont des Linhs ! C'était le bon temps !… du moins pour les familles qui avaient la chance de pouvoir bénéficier de telles vacances. Alain de HEAULME
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